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La transformation de Canuto

Un film di Ariel Kuaray Ortega Ernesto de Carvalho

Dans une communauté Mbyá-Guarani entre le Brésil et l’Argentine, tout le monde a entendu parler de Canuto qui, il y a longtemps, s’est transformé en jaguar avant de décéder tragiquement. Afin de raconter son histoire en collaboration avec sa communauté, le cinéaste indigène Ariel Ortega et son confrère Ernesto De Carvalho interrogent les habitant et habitantes, et recréent un film fictionnalisé sur le sujet - film dont la préparation et le tournage apparaissent dans le documentaire. S’ils tentent de comprendre ce qui est arrivé à Canuto, ils s’interrogent plus encore sur qui pourrait jouer son rôle avec légitimité. Ce film aux narrations étonnantes questionne sans exotisme les représentations et l'imaginaire d'une communauté indigène contemporaine.

Produzione: Brasile , 2023 , 130min.

Trailer 23EDOC: A TRANSFORMAÇÃO DE CANUTO

Ces mots, lancés par le sociologue Edgar Morin à son comparse réalisateur Jean Rouch à la fin de leur film Chronique d’un été (1961), trouvent de nombreux échos dans A Transformação de Canuto, documentaire brésilien réalisé en 2023 par un autre duo de cinéastes, Ariel Kuaray Ortega et Ernesto de Carvalho. Le film, récompensé par le Grand Clap du Festival de cinéma latino-américain de Paris] A Transformação de Canuto a également reçu le Grand Prix Nanook-Jean Rouch au Festival Jean Rouch, ainsi que le Prix du meilleur film et le Prix de la contribution artistique exceptionnelle à l’International Documentary Film Festival Amsterdam (IDFA). , naît de l’immersion de ses réalisateurs durant dix années au sein d’une communauté Mbyá-Guarani située dans la forêt atlantique, à la frontière du Brésil et de l’Argentine – communauté à laquelle appartient Ariel. Quatre cinéastes « dans le bain » : de Jean et Edgar à Ernesto et Ariel, le bain en question a changé de nature, mais l’image est toujours aussi éclairante. Elle interdit à l’anthropologue de faire de cette communauté un grand « Autre » objectivé, et elle nous invite à embrasser dans un même regard le film et l’espace réel au sein duquel il a été produit. Cet espace géographique et social entoure la caméra, et avec elle les deux cinéastes, bien conscients de leur statut d’acteurs du documentaire en train de se faire, au même titre que les Mbyá-Guarani qu’ils filment.

C’est donc en termes spatiaux qu’il nous semble le plus aisé de saisir la structure complexe, proprement « docufictionnelle », de A Transformação de Canuto. Au cœur de cette œuvre, comme à l’intérieur d’un écrin formé de plusieurs strates, il y a le projet de réaliser un film avec les habitant·e·s du village. La fiction collective qui en résulte, et dont plusieurs fragments jalonnent le documentaire, raconte l’histoire de Canuto, un ancien du village qui, quelques décennies auparavant, se serait transformé en jaguar peu avant de mourir. Cependant les entours de cette première entreprise cinématographique ne sont jamais loin : repérages, casting, projections et discussions de plateau filmées au caméscope sont régulièrement inséré·e·s dans la narration, formant une deuxième « couche », documentaire cette fois. Enfin, ces séquences de making of sont elles-mêmes débordées par un projet documentaire plus vaste. Il s’agit pour les cinéastes de donner à voir le quotidien de cette communauté, son organisation, ses lieux et son histoire – une histoire marquée par la lutte pour la défense de son territoire, contre la violence du régime militaire brésilien dans la seconde moitié du XXème siècle